Annulation d’un arrêté de police portant une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir
Veille jurisprudentielle · Date de publication : 21/12/2021 · Date de modification : 28/02/2023
C.E. arrêt n°434256 du 16 juillet 2021
L’association Ligue des Droits de l’Homme forme un recours en excès de pouvoir auprès du tribunal administratif pour demander l’annulation d’un arrêté du maire de St Etienne « portant code de la tranquillité publique ». Le tribunal prononce l’annulation partielle de l’arrêté, et la Cour administrative d’appel rejette l’appel formé par l’association. Celle-ci forme alors un pourvoi auprès du Conseil d’Etat.
Ce dernier relève d’abord que la Cour a rejeté les conclusions de l’association requérante en estimant que l’arrêté se bornait à rappeler les pouvoirs généraux du maire en matière d’ordre public, alors que ledit arrêté : « (…) identifie des comportements précis comme étant, par principe, de nature à troubler l’ordre public, la cour administrative d’appel de Lyon s’est méprise sur la portée de cette décision règlementaire[1] ». Le Conseil annule l’arrêt en raison de cette erreur. Il note ensuite que l’arrêté interdit « comme étant de nature à porter par soi-même atteinte à l’ordre public le seul fait de laisser plus de deux chiens stationner, même temporairement, sur la voie publique (…). » ainsi que le fait pour un groupe de plus de trois personnes d’émettre des bruits de conversation et de musique « audible par les passants », sans en préciser la durée ni l’intensité. Le juge relève que ces mesures s’appliquent pour une durée de trois mois sans limitation de plage horaire, tous les jours de la semaine, et dans un périmètre géographique couvrant tout le centre-ville de la commune. Ecartant l’allégation du maire, tirée de la hausse de la délinquance et de l’incivilité en centre-ville, le Conseil retient que ces mesures d’interdictions portent, du fait de leur caractère général et absolu, une atteinte à la liberté personnelle, en particulier à la liberté d’aller et venir, qui est disproportionnée au regard de l’objectif de sauvegarde de l’ordre public poursuivi. Il annule l’article 1 de l’arrêté et condamne la commune à verser 6000€ à l’association au titre des frais non compris dans les dépens.
[1] CE, 22 juin 1951, Daudignac : Une interdiction générale et absolue peut être légale même si elle porte atteinte à une liberté publique, à condition d’être la seule mesure de nature à prévenir ou faire cesser un trouble à l’ordre public.