CE le 19/05/2025,
n° 503719
Suspension du CFP – survenance de circonstances nouvelles postérieures à la décision de justice
Jurisprudence · Date de publication : 01/12/2025
Expulsions locatives
Rapports locatifs
Aux termes d’une longue procédure d’expulsion, ayant notamment octroyé à Monsieur J. un délai de grâce de 12 mois (L. 412-3 et L. 412-4, CPCE) par un jugement de février 2023, le concours de la force publique (CFP) est accordé par à compter d’octobre 2024. Par une première ordonnance de mars 2025, le TA de Montreuil rejette la demande de suspension de l’exécution de cet arrêté. Le requérant se pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat. Ce dernier suspend l’arrêté, fondant sa décision sur une atteinte grave et manifestement illégale à la dignité humaine de l’occupant, découlant de circonstances nouvelles survenues après la décision judiciaire d’expulsion.
En effet, le CE rappelle qu’en vertu de l’article L. 153-1 du CPCE, « L’Etat est tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires ». Toutefois, le préfet peut légalement refuser d’accorder le CFP pour deux motifs : 1) si des considérations impérieuses de sauvegarde de l’ordre public s’opposent à l’expulsion ; 2) si la survenance de circonstances postérieures à la décision judiciaire est à même de provoquer – en cas de maintien de l’expulsion – une atteinte à la dignité de la personne humaine.
Ainsi, le Conseil d’État considère que l’exécution de l’expulsion, dans le contexte d’une aggravation documentée de l’état psychologique de l’occupant (notamment par suite d’un licenciement professionnel survenu après le jugement initial), est susceptible d’engendrer des conséquences d’une particulière gravité pour sa santé et sa vie. Ces éléments ont été jugés comme des circonstances nouvelles non prises en compte par la décision judiciaire, justifiant la suspension du concours de la force publique.
Par ailleurs, la haute juridiction a identifié une urgence caractérisée par l’imminence de l’expulsion et l’absence de solution de relogement ou d’hébergement immédiat pour l’intéressé. D’autant que le juge de première instance, en considérant que le requérant aurait pu obtenir une prolongation des délais de grâce auprès du JEX sur le fondement de l’article L. 412-3 et L. 412-4, a commis une erreur. En effet, la loi du 27 juillet 2023 a réduit (de 3 ans à 1 an) la durée maximale de délai pouvant être accordée par le juge judiciaire.

