Cour européenne des droits de l'Homme, CEDH le 11/10/2016, n° 19841/06
Violation du droit au respect du domicile des personnes expulsées sans examen de proportionnalité, information sur la date d’expulsion et consultation pour une solution de relogement
Jurisprudence · Date de publication : 12/09/2017 · Date de modification : 07/03/2023
Occupation d'un terrain sans titre
CEDH, aff. Bogdonavicius et autres c. Russie, 11 octobre 2016 (arrêt rendu définitif le 6 mars 2017), requête n° 19841/06
Six familles occupent sans titre 43 maisons en Russie. Ils ont construit ces maisons à la suite d’une règlementation criminalisant le mode de vie nomade et obligeant les communautés roms à se sédentariser. Les occupants ne sont pas parvenus à faire légaliser leurs constructions ni à obtenir des titres de propriété. Ces dernières ont été détruites et les familles expulsées.
La Cour européenne des droits de l’Homme, après avoir rappelé la définition de la notion de « domicile », et les principes généraux relatifs au respect du domicile dans le contexte d’une expulsion (§97), considère qu’il s’agissait bien en l’espèce du domicile des personnes. Elle précise que le fait que ces maisons ne soient pas leur domicile officiellement enregistré et que les familles soient propriétaires de biens immobiliers ailleurs ne permet pas de considérer que ces maisons ne sont pas leur domicile dès lors qu’elles entretiennent avec ces lieux d’habitation des liens suffisants et continus.
La Cour constate la violation de l’article 8 par l’Etat dès lors que les juridictions internes ont ordonné la démolition des maisons des requérants sans avoir analysé la proportionnalité de cette mesure et qu’aucune attention particulière n’a été portée aux conséquences de l’expulsion. Les occupants n’ont pas été informés de la date et des modalités de l’expulsion et aucune véritable consultation n’a été menée avec les occupants sur les possibilités de relogement.
La Cour reconnaît le dommage matériel subi par les occupants et prononce le versement d’une indemnisation forfaitaire à hauteur de 500 eux pour chaque requérant, ainsi qu’une indemnisation à hauteur de 7 500 euros pour chacun au titre du préjudice moral subi.
La Cour ne reconnaît pas en l’espèce la violation de l’article 1 protocole 1 de la CEDH, suite à la destruction de leurs habitations.